J’aime Lyon 2 – Les quais du Rhône

Il faut imaginer un trait d’union entre plusieurs mondes…

 

D’abord entre deux parcs que seule la superficie rapproche (près de 300 hectares chacun). De même dimension, le parc de la Tête d’Or et le parc de Gerland sont pourtant bien différents.

 

La Tête d’Or c’est le parc à l’anglaise bordé des plus beaux hôtels particuliers de Lyon et accueillant entre le déjeuner et avant le goûter les familles nombreuses de la bonne société lyonnaise, serre tête, jupe plissée et catogan. On y croise la jeunesse dorée lyonnaise, les belles joggeuses échappées d’une série américaine et les quadras enfuis des bureaux voisins et venant chercher le peu de calme qui fera passer le sandwich trop vite avalé.

La roseraie propose une échappée aux senteurs enivrantes, tandis que des fleurs multicolores semblant échappées d’un champ plus que des serres du service des Espaces Verts ponctuent les allées. Au centre un vaste plan d’eau clair, où l’on reconnaît les pêcheurs en ballade, car ce sont ceux qui donnent une main abandonnée à leur compagne, tandis que tout leur être est tourné vers l’onde.

 

Le Parc de Gerland, récent, fait l’objet d’une composition beaucoup plus contemporaine, axée autour de grandes plaines de jeux. La population est ici plus bigarrée. Familles également nombreuses où les mamans drapées de noir veillent à leur petit monde pendant que les hommes s’affairent autour d’un barbecue improvisé. Jeunesse multicolore réunie autour d’un ballon lui aussi indifféremment blanc, jaune fluo voir parfois rose ou noir. Amoureux se roulant au pied d’un arbre, jugeant que la distance entre les groupes évite de voir la main glissée sous le corsage. Patinettes, vélos, rollers et skates s’affrontent sur les différentes structures prévues à cet effet.

Tout autour du Parc, ce n’est plus le sixième arrondissement et ses belles façades haussmanniennes ou arts et déco, mais un quartier en pleine recomposition : installations sportives et culturelles : la Halle et le Stade signé du grand urbaniste lyonnais Tonny Garnier, bureaux et locaux universitaires à l’architecture soignée cohabitent avec les vastes emprises industrielles du Port et un quartier d’habitat qui voit fleurir les nouvelles constructions.

 

Entre les deux plusieurs kilomètres de berges du Rhône entièrement aménagées. Dans les années 1990, la commission qui sélectionne les sites à classer au patrimoine mondial de l’UNESCO avait fait les gros yeux : pas question de distinguer Lyon et ses 2000 ans d’histoire urbaine sans engagements de la Collectivité quand à un réaménagement des quais du Rhône. Ces derniers étaient devenus des espaces servants, entièrement dévolus à l’automobile et réduit au rôle de parkings. Mal éclairés, sans animations, c’était aussi un lieu glauque la nuit tombée.

 

La Ville s’est donc engagé à entièrement réaménager les quais entre les deux parcs, en rive gauche si l’on suit le sens du courant.

 

S’en suit une promenade de plusieurs kilomètres accueillant piétons, cycles et rollers. Promenade ponctuée de jardins linéaires, jeux pour enfants, jeux d’eau et nombreuses péniches amarrées accueillant bars, restaurants et boîtes.

 

C’est un trait d’union entre des quartiers très différents, le bourgeois et résidentiel sixième, le commerçant troisième, le plus populaire septième, et notamment la Guillotière, ancien village qui a accueilli les différentes vagues d’immigration.

 

Certains projets me laissaient froids, comme cette sorte d’amphithéâtre au niveau du pont de la Guillotière. Habitué des quartiers de grands ensembles, je savais par expérience que nombre de ces agoras ou lieux que les urbanistes ont imaginé publics sont rapidement squattés par une ou deux bandes et de fait fort éloignés de leur fonction première.

 

Et là, le miracle se produit, la sauce prend. Le succès est phénoménal, au moindre rayon les berges sont inondées de monde et on assiste au spectacle de plus en plus rare d’une population diversifiée cohabitant sans soucis dans un espace restreint, heureuses bouffée d’air à l’heure du communautarisme et du repli sur soi.

 

La promenade constitue un balcon sur la Ville de Lyon, et en marchant on regardera tour à tour les pentes de la Croix Rousse, l’Opéra, l’hôtel Dieu, l’Université, mais aussi la gare de Perrache, la prison, le quartier en devenir de la Confluence, hérissé de grue, la fine langue de sable où se rejoignent les eaux de la Saône et du Rhône, puis la vue qui file sur les silhouettes étranges et fascinantes des raffineries de la vallée de la Chimie. Si le ciel est clair et que le vent souffle sur la pollution, on distingue très clairement les trois sommets des monts du Pilat.

 

Dans le Rhône élargi et assagi au point de revêtir l’aspect d’un lac, on verra une énorme péniche de croisière manœuvrer.

 

Entre temps on aura pris grand soin de marcher tout près de l’eau pour regarder les cygnes, les chevesnes, les gardons et les barbeaux nettoyant activement la mousse des quais. Il va s’en dire qu’une bière fraîche s’impose sur le pont d’une péniche (mon adresse c’est la Passagère, petite péniche mais plus sympa que d'autres un peu trop branchouille à mon goût). Parfois à son bord,  alors que d’autres refont le monde au son de chansons françaises à texte engagées, j’ai pu assister à une éclosion massive de sulphure, l’un deux s’étant même perdu dans ma bière…

  

Originally posted 2008-10-27 18:23:00.

4 commentaires.

  1. C'est une jolie description que tu nous fais là. J'aurai presque envie d'y rester…
    Par contre ya juste une erreur qu'un stephanois de mon rang ne peut laisser incorrigés.
    « la fine langue de sable où se rejoignent les eaux de la Saône et de la Loire »
    C'est pas la loire et! c'est le rhone!
    Je sais tu vas me dire que tu n'avais pas tes lunettes…
    Pour la langue de sable qui separe les 2 fleuves

  2. Je ne suis allé à Lyon que trois fois, et encore vite fait. Mais la ville avait l'air sympa et la description que tu en fais (toujours très agréable à lire mon cher Alexis)donne envie de découvrir la ville.
    J'espère d'ailleurs bien aller boire cette fameuse mousse sur les quais avec toi un de ces quatre !)

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